Discipline fascinante qui fait rêver petits et grands, l'archéologie est également très présente en Serbie. Au croisement entre l'Ouest et l'Est mais aussi la Baltique et la Méditerranée, le territoire actuel de la Serbie était un point de passage obligé des personnes, mais aussi des objets, des idées et des innovations.
Plusieurs sites archéologiques serbes sont connus pour avoir donné leurs noms à des cultures comme c'est le cas pour les sites de Vinča ou de Starčevo pour ne citer que les plus connus.
Ainsi, bien avant l'installation du peuple nomade des Serbes au VIIème siècle de notre ère, d'autres populations ont occupé le territoire actuel de la Serbie et ont laissé derrière eux des sites qui figurent parmi les plus visités du pays, aussi bien par les Serbes eux mêmes que par les touristes étrangers.
À travers ce nouvel article thématique, nous allons visiter en suivant un ordre chronologique du plus ancien au plus récent, les cinq sites archéologiques serbes qui méritent un déplacement en Serbie pour les amoureux de l'Histoire et de l'Archéologie.
Le site archéologique de Lepenski Vir, situé sur la rive Sud du Danube, dans le parc national du Đerdap, à quelques kilomètres seulement de la ville de Donji Milanovac. Le site a donné son nom à une culture éponyme qui s'est développée principalement autour du Danube (sur les rives serbes et roumaines) et à la confluence de ce dernier avec le fleuve Timok. Le site date du Mésolithique, une époque comprise entre le Paléolithique et le Néolithique soit entre 7000 av. J.-C. et 4800 av. J.-C. dans le cas de Lepenski Vir.
La première occupation humaine de Lepenski Vir remonte à 7000 av. J.-C., une époque où le climat se réchauffait un peu et favorisait donc l'installation en dehors d'habitats troglodytes.
Les fouilles archéologiques sur le site, menées entre 1965 et 1971 ont permis la mise au jour de plus de 136 bâtiments et autels mais aussi de nombreux objets comme des outils en os et en pierre mais aussi des sculptures réalisées à partir de galets de grès trouvés près du fleuve. Ces sculptures représentaient au choix des formes géométriques ou anthropomorphiques comme c'est le cas pour la sculpture dite « du Dieu Poisson », mesurant 0,7m de haut et datant de 5000 av. J.-C., soit l'apogée de la culture de Lepenski Vir.
De nos jours, il est possible de visiter le site, reconnaissable par la structure métallique blanche qui vient couvrir et protéger les vestiges des intempéries climatiques. La muséographie, particulièrement moderne et réussie, permet de s'imaginer l'aspect du site au moment de son utilisation. Des tablettes et autres cinématiques permettent d'en apprendre plus sur l'histoire du site, de la culture, des recherches mais aussi sur les vestiges et objets découverts sur le site afin de voir plus « qu'un peu de terre et des cailloux ».
Le site archéologique de Viminacium près de la ville de Kostolac est sans aucun doute celui qui jouit de la plus grande et récente notoriété, due aux recherches ininterrompues et aux découvertes faites par les archéologues.
À l'origine, le site est construit au Ier siècle de notre ère en tant que camp militaire afin d'accueillir la légion VII Claudia. Comme cela s'observe dans d'autres sites de l'Empire romain, la proximité d'un camp légionnaire est une aubaine pour le commerce et donc le développement d'une ville. Ainsi, Viminacium prospéra au delà du camp militaire et les recherches archéologiques ont permis de mettre au jour des vestiges de temples, de rues, de places, un amphithéâtre, un palais, des hippodromes, des aqueducs, des thermes mais aussi des nécropoles, le tout sur une surface de plus de 450 hectares.
Viminacium eut l'honneur de recevoir plusieurs Empereurs au cours de son histoire, à commencer par Trajan qui en fit sa base arrière principale lors de la guerre contre les Daces dans les années 110. À la fin du IIIème siècle, l'Empereur Dioclétien fit de Viminacium la capitale de la province de Mésie supérieure. Dans les années qui suivirent, les Empereurs choisirent Viminacium comme un lieu de rencontres officielles.
C'est dans les années 440 et l'invasion des Huns en Europe de l'Est que Vimacium fut détruite puis abandonné avant d'être réutilisé pendant la période byzantine
Si les recherches archéologiques du site ont commencé dès les années 1970, c'est depuis une dizaine d'années que le site révèle ses plus beaux trésors comme un squelette complet de mammouth, une statue de jade de 35cm ou encore une arène de gladiateurs comprenant les ossements d'animaux sauvages. Au total, ce sont plus de 700 objets en or et en argent qui sont exposés au Musée National de Belgrade ou au Musée National de Požarevac.
Le site se visite de nos jours, avec l'aide d'un guide serbophone ou anglophone. Comptez entre 2 et 3 heures de visite vue l'étendue du site.
Le site archéologique de Sirmium est un autre site romain majeur de Serbie, localisé dans la ville moderne de Sremska Mitrovica. Bien que moins connu et moins visité que le précédent, son rôle est bien grand durant la période romaine.
Fondé au Ier siècle de notre ère et très tôt nommé capitale de la province de Pannonie puis de Pannonie inférieure à partir de 103, Sirmium a acquis sa grande puissance et son importance durant la période de la Tétrarchie militaire (293 ap. J.-C. - 324 ap. J.-C.) où l'Empire est réparti entre quatre Empereurs pour en faciliter l'administration et la défense. Sirmium devint alors une capitale impériale et pas moins de dix futurs Empereurs y sont nés. Et c'est également à Sirmium que Théodose le Grand fut couronné Empereur avant de scinder officiellement l'Empire romain en deux : Empire romain d'Occident et Empire romain d'Orient.
Cependant, le si grand honneur d'être capitale impériale romaine ne se voit que très peu dans la ville moderne de Sremska Mitrovica, en effet, les rues et bâtiments contemporains ont totalement recouvert les vestiges romains, ce qui avait valu dans les années 1970 à une drôle de propositions de la part d'archéologues américains qui avaient demandé que l'on bâtisse une nouvelle ville pour les habitants et pouvoir ainsi raser la ville et effectuer des recherches.
Il est toutefois possible de visiter une partie du palais impérial de Sirmium, recouvert lui aussi d'une structure métallique afin de protéger les vestiges, mais la plus grande partie de ce dernier se trouve dans le sous-sol de la ville, tout comme l'hippodrome, qui bien que localisé par des méthodes de détection n'a jamais pu être mis au jour lors de fouilles archéologiques.
D'autres vestiges romains sont également visibles sur la place Žitni Trg, en plein air, avec néanmoins un panneau explicatif avec traduction française, puisque Sremska Mitrovica est notamment jumelée avec la ville française de Nevers.
Le site archéologique de Felix Romuliana à Gamzigrad, près de Zaječar est probablement le site archéologique le plus connu de Serbie puisqu'il jouit de son statut de site inscrit au patrimoine mondial de l'UNESCO, et ce depuis 2007.
Le site est étroitement lié à Galère, né dans les environs et grand militaire de l'armée romaine avant de devenir César (second de l'Empereur) dans le cadre de la Tétrarchie. C'est à ce moment là, à la fin du IIIème et au début du IVème siècle de notre ère qu'il entreprend la construction d'un palais sur ses terres natales. Il le fit appelé Romuliana, en l'honneur de sa mère, Romula. Devenu Empereur à compter de 305 ap. J.-C., il décida d'embellir encore plus son palais fortifié. Agrandissements, mausolées pour sa mère et pour lui même, rien n'est trop beau pour faire de Felix Romuliana l'outil de sa propagande politique.
Cependant, à la mort de Galère, le site est très vite abandonné avant d'être pillé et incendié par les Huns au milieu du Vème siècle. Restauré un temps par les byzantins, le palais fortifié de Felix Romuliana ne put jamais retrouvé sa gloire d'antan.
Le site est fouillé par intermittences, une première fois en 1953, puis de 1957 à 1963 et enfin dans les années 1970 par le célèbre archéologue serbe Dragoslav Srejović.
Le site se visite aujourd'hui en passant par la porte occidentale où l'on peut voir encore les murs de défense en élévation. À l'intérieur, on retrouve les vestiges du palais, des colonnes toujours debout, des fragments de mosaïques et les mausolées impériaux.
Le tout est visitable seul en se fiant aux panneaux informatifs ou par le dispositif d'un audio-guide (langue française comprise), luxe plutôt rare encore en Serbie.
Le dernier site archéologique qu'il convient de mentionner en Serbie est le site de Caričin Grad connu également sous le nom de Justiniana Prima.
Il s'agit d'un site byzantin, donc situé dans l'Empire Romain d'Orient, postérieur à la Tétrarchie et à l'instauration de la religion chrétienne dans l'Empire.
Le site est construit sous l'Empereur byzantin Justinien Ier dans les environs de 530 dans un savant mélange d'architecture romaine classique et d'architecture chrétienne, on voit ainsi cohabiter églises avec des thermes, forums et des rues à colonnades. Très vite, Justinien Ier créa l'épiscopat de Justiniana Prima et la cité devient préfecture de l'Illyricum (à la place de Thessalonique). L'influence de Justiniana Prima s'étendait à la Dacie puisque le diocèse dace lui était raccroché.
Tout au long de la vie de l'Empereur, tous les moyens ont été donné au bon développement du site qui se dota d'un important système de fabrication, d'un quartier artisanal, de rues, de portiques, d'églises et d'une acropole.
Cependant, l'apogée de Justiniana Prima ne dura qu'un temps très bref puisque le site fut envahi, pillé et incendié par les Avars dès les premières années des années 600. Thessalonique retrouva alors son importance d'antan.
Les premières fouilles archéologiques réalisées à Justiniana Prima remontent à 1912 avant de s'intensifier aux lendemains de la Seconde Guerre Mondiale et encore plus depuis la fin des années 1990 dans une co-direction de recherches franco-serbe.
De nos jours, le site se visite, de nombreux panneaux informatifs parcourent les vestiges et permettent de mettre la lumière sur un site aussi important qu'éphémère.
Amoureux de l'Histoire ou amateurs, toutes les périodes et toute la grandeur et la beauté de l'Histoire ancienne serbe vous attend, au détour d'une sculpture de « Dieu Poisson », d'une colonne ou d'une acropole.
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